C'est ce qu'on appelle la "sérendipité". Ou le fait de faire une découverte scientifique inattendue. Des chercheurs viennent d'identifier une maladie neurologique rare qui pourrait aussi aider à mieux comprendre les phénomènes de démence.
6 à 8 000. C'est le nombre de maladies rares aujourd'hui identifiées. Pas une année sans que des scientifiques n'allongent cette liste grâce à leurs découvertes. Hasard du calendrier, une nouvelle maladie du cerveau vient d'être repérée à quelques jours de la Journée mondiale des maladies rares, le 28 février 2023. L'étude a été publiée le 10 février 2023 dans la célèbre revue américaine Nature.
3 enfants atteints d'une pathologie neurologique
Des scientifiques de l'Institut national de recherche sur le génome humain (NHGRI) et du Programme des maladies non diagnostiquées (UDP), deux institutions américaines, ont identifié trois enfants atteints d'une pathologie neurologique, deux frère et sœur et un enfant non apparenté. Les trois petits patients ont en commun des problèmes de coordination motrice, d'élocution et d'autres similitudes physiques, comme des yeux en amande, une arête nasale déprimée et un arc de cupidon proéminent au niveau de la lèvre supérieure. Autre élément similaire : des mutations dans les deux copies du gène ATG4D, repérées à l'aide d'outils génomiques et cellulaires dernière technologie. C'est là que cette découverte devient doublement intéressante car les chercheurs ont compris qu'elle pourrait aussi les aider à mieux comprendre les maladies neurodégénératives.
Un dysfonctionnement du recyclage cellulaire
En fait, le gène ATG4D, dysfonctionnel chez les trois enfants malades, joue un rôle dans l'entretien des cellules du corps humain. Ce processus appelé « autophagie » permet de « décomposer » et de « recycler » les parties endommagées de certaines cellules pour rester en bonne santé. Les neurones, autrement appelés « cellules nerveuses », sont particulièrement dépendants de l'autophagie pour leur survie. D'après les auteurs de l'étude, les symptômes des enfants sont donc probablement causés par un recyclage cellulaire insuffisant. Ces dernières années, les recherches se sont multipliées pour comprendre le lien entre autophagie et santé cérébrale. En 2015, des scientifiques identifient pour la première fois cette même maladie neurologique génétique rare chez des chiens « Lagotto Romagnolo », une race italienne réputée pour ses talents à la chasse aux truffes. Les chiens affectés présentaient notamment un comportement anormal, une atrophie du cervelet, des problèmes de coordination motrice… Huit ans plus tard, le lien est fait avec l'Homme. En 2021, des professeurs de l'université de Californie à Riverside repèrent que le mécanisme d'autophagie n'est pas optimal chez les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, arguant que ce dysfonctionnement cellulaire pourrait en être l'une des causes.
Comprendre des troubles neurologiques courants
Avec la nouvelle découverte du NHGRI sur la mutation du gène ATG4D, toutes les pièces du puzzle semblent donc s'emboîter. Si une grande partie du gène responsable de l'autophagie reste encore inconnue, la découverte de cette nouvelle maladie rare permettra certainement de faire des pas de géants pour comprendre des troubles neurologiques courants, comme la démence et notamment la maladie d'Alzheimer. C'est en tout cas ce que promettent les chercheurs américains, parmi lesquels May Christine Malicdan, rédactrice principale de l'étude : « Les maladies rares peuvent nous aider à comprendre les voies biologiques, afin que nous puissions mieux comprendre comment ces voies contribuent à d'autres conditions rares et courantes », détaille-t-elle. « En apprenant davantage sur l'ATG4D et l'autophagie, les chercheurs pourraient être en mesure de développer de nouveaux traitements pour cette maladie et d'autres impliquant des voies d'autophagie », précise l'Institut national de recherche sur le génome humain. Après ces trois premiers cas, d'autres patients devront le confirmer.
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